MONTY ALEXANDER

Le 6 juin 1944, Bernard Law Montgomery débarque en Normandie. Le même jour, de l’autre côté de l’océan, en Jamaïque, Mme Alexander donne naissance à un petit garçon qu’elle prénomme Bernard Montgomery en hommage au général libérateur.
Dès 4 ans, il joue déjà à l’oreille pour son entourage de Kingston. A 6 ans, il débute les cours de piano classique mais le solfège, ce n’est pas pour lui et il raccroche très vite ! Il continue d’absorber comme éponge tout ce qu’il entend dont beaucoup de stars américaines. En 1953, il va voir Nat Cole et Louis Armstrong sur la scène du Carib Theater. A 14 ans, suivant les conseils de son mentor Wynton Kelly, il commence à jouer dans les clubs de Kingston. « Je me suis mis à jouer avec d’autres musiciens et à comprendre ce que le jazz veut dire, c’est-à-dire une sorte de conversation entre musiciens » a-t-il déclaré à jazzmania.be
Vers 16 ans, il devient le leader du groupe Monty and the Cyclones. A cette époque, il est aussi pianiste d’accompagnement pour diverses formations et enregistre chez Federal Records, Treasure Isle et surtout au Studio One où il assiste à la naissance du ska. En particulier, il joue pour l’un des pères fondateurs du ska, Ernest Ranglin, dans le groupe Clue J and the Blues Blasters, qui deviendra les Skatalites, le backing band du Studio One, où débutera Bob Marley avec The Wailers…
En 1961, Monty Alexander émigre avec ses parents aux Etats-Unis. Alors qu’il joue dans un club de Las Vegas, il est repéré par Jilly Rizzo, le patron du célèbre Jilly’s Saloon à New York, venu boire un verre en compagnie de… Franck Sinatra ! Direction la Grande Pomme où il accompagne Sinatra (à des matchs de boxe aussi) et joue très vite avec les plus grands au Jilly’s mais aussi au Minton’s et au Club Playboy : Dizzy Gillespie, Clark Terry, Sonny Rollins, Count Basie, Miles Davis (qui lui griffonne son numéro sur une boîte d’allumettes). Il se lie d’amitié avec le vibraphoniste Milt Jackson et le contrebassiste Ray Brown (dans la salle, il se propose spontanément de remplacer son pianiste ivre et c’est le coup de foudre).
En 1964, à 20 ans, il sort son premier album : Alexander The Great chez Pacific Jazz.
On le compare au pianiste canadien Oscar Peterson, dont il partage le jeu vif et brillant. C’est ce dernier qui va le recommander et signer chez le label MPS qui fera définitivement décoller sa carrière à partir de 1971. Monty Alexander participe à l’œuvre tardive de Milt Jackson : Here comes the Sun (1971), We’ve only just begun (1972), Perception (1974).
En parallèle, il sort avec son compatriote Ernest Ranglin : Rass ! (1974), Cobilimbo (1978), Monty Alexander & Ernest Ranglin (1981)
Il adopte le format trio à la même période. En 1976, il monte pour la première fois au festival de Montreux avec John Clayton et Jeff Hamilton pour un concert qui a à jamais marqué les esprits. Il sera ensuite invité plus de 23 fois ! Puis vient son trio Triple Treat avec Ray Brown et Herb Ellis, actifs jusque dans les années 2000 !
En parallèle, il va multiplier les collaborations avec les plus grands de Quincy Jones à Herbie Hancock… En 1987, il participe à la bande son oscarisée du film Bird, hommage à Charlie « Yardbird » Parker. En 1991, il assure la direction artistique de Nathalie Cole dans un album hommage à Cole père, sept fois lauréat aux Grammy Awards. En 1995, il collabore avec Barbara Hendriks sur A Tribute to Duke Ellington.
En 1978, il associe Othello Molineaux, joueur de steel drum, percussion de Trinité et Tobago,  à son trio. « Aux USA, de temps en temps, je me souvenais d’un rythme de la Jamaïque et je demandais aux musiciens de jouer aussi mais souvent ils n’avaient pas ça dans le sent, a-t-il confié à jazzmania.be. La musique de la Jamaïque est vraiment arrivée plus tard car au début je cherchais surtout à assimiler la musique de New-York, à coller à la musique de mes partenaires ».
Il continue ainsi de brasser toujours un peu plus la musique jamaïcaine jusqu’à parfois former de véritables formations reggae avec les albums Jamboree (1994), Yard Movement (1996), Stir it up (reprises de Bob Marley, 1999), Monty Alexander meets Sly and Robbie (2000), Goin’Yard (2001), Rock steady (il remet le couvert avec Ernest Ranglin en 2004), Concrete Jungle (second hommage à Bob Marley en 2006). La plus belle des synthèses de ses multiples identités est peut-être Harlem Kingston Express : Live, nommé aux Grammy Awards en 2011. Ou Rastamonk vibrations (2019) hommage à Thelonius Monk qui a fait le voyage inverse en fréquentant les immigrants jamaïcains dans le quartier de San Juan à New-York.
Monty Alexander aime à rappeler que la devise de la Jamaïque est « E pluribus unm » (de plusieurs, un seul peuple) ; une devise que l’on pourrait aussi appliquer au peuple du Jazz non ?!

Nouvel album : D-Day

L’Album-Day est le fruit d’amitiés croisées t de connivences artistiques entre Monty Alexander et les labels et tourneurs français PeeWee ! et VO Music.
Enregistré principalement au Studio Sextan en octobre 2023, D-Day rassemble la quintessence de deux séances fleuves. On y entend un Monty Alexander plus introspectif qu’à l’habitude, sûr du temps à prendre pour atteindre la note juste, celle qui arrive seulement avec le sentiment de l’assurance.
Avec les jeunes et brillants Luke Sellick et Jason Brown, sa rythmique actuelle, il trouve des partenaires à l’unisson de ses disgressions harmoniques et rythmiques, en fusion totale, et toujours transpercés par le beat entêtant du reggae et le balancement contagieux du swing.

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